Numéro |
Biologie Aujourd’hui
Volume 216, Numéro 3-4, 2022
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Page(s) | 75 - 81 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/jbio/2022024 | |
Publié en ligne | 6 février 2023 |
Article
De la neuroendocrinologie à la biologie cellulaire : Andrée Tixier-Vidal (1923–2021)
From neuroendocrinology to cell biology: Andrée Tixier-Vidal
Institut des Maladies neurodégénératives, UMR CNRS 5293, Université de Bordeaux, 146 rue Léo-Saignat, 33000 Bordeaux, France
* Auteur correspondant : andre.calas@laposte.net
Reçu :
29
Septembre
2022
Cet article relate la vie, la carrière et l’œuvre scientifique de Mme Andrée Tixier-Vidal, disparue en décembre 2021. Il montre comment, après avoir développé une approche histophysiologique originale de la neuroendocrinologie et tout particulièrement de l’axe hypophyso-thyroïdien, elle a réalisé des travaux pionniers qui ont complètement renouvelé les connaissances sur les neurones hypothalamiques à thyréolibérine (TRH) qui interviennent dans la régulation des cellules à thyréostimuline (TSH), mais également de celles à prolactine (PRL). Le fil conducteur de ses recherches a été la biologie cellulaire de la sécrétion abordée par les techniques morphologiques et cytochimiques sur des modèles originaux de cultures organotypiques d’hypophyse mais aussi de cellules tumorales GH3 et enfin de neurones hypothalamiques. Le rayonnement scientifique de Mme Tixier-Vidal et de son équipe se prolonge encore à travers les multiples générations de chercheurs qui ont eu le privilège de profiter de son dynamisme intellectuel et de son enthousiasme pour la recherche en biologie.
Abstract
This article relates the life, career and main scientific achievements of a pioneer in neuroendocrinology and French cell biology research, Mrs Andrée Tixier-Vidal, who passed away in December 2021. After her first works on hypophyseal-thyroid neuroendocrine axis, in birds then in mammals, Andrée Tixier-Vidal devoted herself then her group at the College of France to the histophysiological study of adenohypophysis and namely of prolactin (PRL) cells. Using in vitro models of organotypic cultures and cultures of GH3 cells, she described up to ultrastructural level the secretory process of PRL and its regulation by TRH. Furthermore, she extended her study to the TRH neurons themselves thanks to original models of in vitro cultures of hypothalamic neurons. Her fundamental and methodological achievements have largely contributed to major knowledge advances in cell biology of the secretion during the last century.
Mots clés : neuroendocrinologie / biologie cellulaire / hypophyse / sécrétion / prolactine
Key words: neuroendocrinology / cell biology / hypophysis / secretion / prolactin
© Société de Biologie, 2023
Il y a presque 20 ans, en mars 2003, ses collaborateurs et ses amis fêtaient le jubilé de Mme Tixier-Vidal autour du cinquantième anniversaire de sa première publication (Figure 1). Cinq ans après, à l’occasion de mon propre départ en retraite, Mme Tixier faisait pour moi ce que je vais faire dans les lignes qui suivent, c’est-à-dire évoquer sa carrière et son œuvre scientifique, puisqu’elle nous a quittés en décembre dernier.
Andrée Vidal est née le 10 avril 1923 à Chasseneuil-sur-Bonnieure, petite ville près d’Angoulême, un des berceaux de la « charentaise », où seront ses racines, avec une maison bâtie par ses parents et qu’elle retrouvera toujours avec joie pour les vacances. Sa mère, « au foyer », a un caractère trempé qu’elle légua, dit-on, à sa fille. Son père, cheminot, ne tarde pas à deviner ses aptitudes remarquables et, pour lui donner le maximum de chances dans ses études après le « Certificat », se fait muter à Paris-Austerlitz, installant sa famille à Choisy-le-Roi. De fait, Andrée intègre en 1939 l’École normale d’instituteurs puis, en 1943, l’ENS féminine de Fontenay (émigrée à Nice jusqu’à la fin de la guerre). C’est là que, surmontant le décès de son père en 1945, elle prépare et obtient en 1947 l’agrégation de Sciences Naturelles, ce qui lui vaut d’être nommée à la rentrée suivante professeur au lycée Fénelon à Lille. Elle n’y restera qu’un an car le souvenir qu’elle a laissé à Fontenay lui fait proposer par l’ENS un poste d’agrégée préparatrice qu’elle va occuper pendant 7 ans. Parallèlement à de lourdes tâches d’enseignement, elle découvre la recherche, dans le domaine de l’endocrinologie. Ses premières publications (dans les Annales d’endocrinologie et les Comptes rendus de la Société de Biologie) concernent en effet le développement de la thyroïde du poulet, sujet qui lui avait été donné par le Pr Caridroit avant son décès prématuré en 1950 (Vidal, 1953a, 1953b). Elle put cependant continuer à travailler sur ce thème, tout d’abord dans le laboratoire de Marcel Prenant à la Sorbonne jusqu’en 1953 puis dans celui de Jacques Benoît au Collège de France dans son annexe de la Porte d’Auteuil. C’est sur le conseil de Benoît qu’elle décide de devenir chercheuse à temps complet en se présentant au CNRS en 1955. Elle y fera toute sa carrière jusqu’à la Direction de recherche en 1973 et l’éméritat en 1992. Elle ne quittera pas non plus le Collège, en créant, dès 1970 au siège même de cette maison prestigieuse, sa propre équipe de Neuroendocrinologie Cellulaire et Moléculaire, qui sera successivement rattachée à plusieurs chaires et à différents professeurs, heureux d’accueillir un groupe aussi dynamique et internationalement reconnu.
Andrée Vidal ayant choisi, dès son mariage en 1953, de faire précéder son patronyme par celui de son mari, Marcel Tixier, haut fonctionnaire au ministère des Finances, c’est sous ce double nom, et en tant qu’Attachée de recherche, qu’elle soutient sa thèse d’État en 1958 sur l’étude histophysiologique des relations hypophyse-thyroïde chez l’embryon de poulet (Tixier, 1954 ; Tixier-Vidal, 1955), un titre qui reflète bien l’influence de Jacques Benoît, alors titulaire de la chaire d’Histophysiologie au Collège de France. Pour lui, ce néologisme désignait l’approche de la physiologie à travers l’histologie à condition d’y introduire le facteur temporel et/ou expérimental. Ce fut effectivement la colonne vertébrale de toute l’activité de recherche d’Andrée Tixier qui sut non seulement développer cette approche en ajoutant à la microscopie photonique la microscopie électronique (dont elle devint une référence et qu’elle pratiquait encore avec bonheur dans mon laboratoire de Jussieu où elle avait demandé l’éméritat) mais aussi l’enrichir sur le plan de la sensibilité et de la spécificité en couplant les deux microscopies à l’histochimie, à la radio-autographie puis à l’immunohistochimie, au fur et à mesure que ces techniques de marquage devenaient disponibles. Ainsi utilisait-elle de façon dynamique la morphologie, mot créé par Goethe, qu’elle aimait à citer, pour qualifier l’étude d’une forme, non pas statique et fixée (Gestalt en allemand), mais en mouvement (Bildung), qui est la manifestation même de l’activité interne du vivant.
Le grand mérite d’Andrée Tixier puis de son école a été d’appliquer ces méthodes morphologiques performantes non seulement pour des expériences in vivo mais aussi à des modèles originaux de cultures in vitro dans des conditions contrôlées.
C’est tout d’abord, dans la suite de sa thèse, sur la thyroïde mais cette fois chez l’animal fétiche du laboratoire Benoît, le canard Pékin mâle, que Mme Tixier poursuit son travail, très rapidement étendu à l’hypophyse dont elle est « physiologiquement » inséparable. Avec mon futur patron, Ivan Assenmacher (Figure 2), et en utilisant pour une étude biochimique l’iode radioactif, Mme Tixier-Vidal étudie notamment les variations saisonnières de l’activité thyroïdienne, maximale au cours de l’automne et de l’hiver, puis l’effet de la lumière dont on sait qu’il est spectaculaire sur le testicule et qui semble également stimulant sur la thyroïde (Tixier-Vidal & Assenmacher, 1958). Quant à l’hypophyse, son ablation réduit la transformation de T3 en T4. Plus précisément, la fameuse déconnexion hypothalamo-hypophysaire, possible chez les oiseaux par section des veines-portes sans lésion de la tige pituitaire (Figure 3), abolit, on le sait, la fonction gonadique et déprime la fonction thyréotrope, qui reste cependant relativement indépendante de l’hypothalamus comme la thyroïde elle-même vis-à-vis de l’hypophyse (Assenmacher & Tixier-Vidal, 1959).
C’est cette dernière qui va de plus en plus attirer l’attention de Mme Tixier-Vidal et sur laquelle Patrice Mollard décrit dans ce volume les dernières avancées de la recherche et notamment la découverte des réseaux de cellules endocrines
Après un stage chez le « pape » de la cytochimie hypophysaire, Marc Herlant à Bruxelles, Mme Tixier met en œuvre les techniques tinctoriales qu’il avait inventées pour différencier les cellules sécrétrices sur la base de leur affinité pour certains colorants (Figure 4). Elle en distingue ainsi six types, responsables chacun d’une sécrétion hypophysaire comme le démontre − dans une démarche typiquement histophysiologique − leur réaction à diverses conditions environnementales (le cycle annuel) ou expérimentales (injection de réserpine ou d’anti-thyroïdiens) (Tixier-Vidal, 1962 ; Tixier-Vidal et al., 1962). Ses observations les plus spectaculaires concernent les cellules gonadotropes à folliculo-stimulating hormone (FSH) et luteotropic hormone (LH), identifiées par leur réponse à la lumière, à l’obscurité ou à la section des veines-portes qui provoque leur réduction de volume puis leur dédifférenciation. La figure 5 illustre la réponse histochimique de ces cellules lors de l’activité sexuelle chez la caille. Canard, caille mais aussi pigeon, poulet : on voit dans ce bestiaire l’intérêt des approches comparatives qu’Hervé Tostivint illustre plus loin dans ce volume chez les poissons avec leurs deux « neurohypophyses ». Mais c’est l’immunohistochimie et la microscopie électronique qui vont permettre à Andrée Tixier-Vidal de préciser la nomenclature des cellules hypophysaires (Tixier-Vidal, 1965), illustrée ici chez le canard (Figure 6), et de repérer celle qui va devenir son sujet de prédilection, la cellule à prolactine dont Valérie Bernard rapporte dans ce volume les dernières implications, notamment en clinique.
Radio-autographie, cytochimie et immunocytochimie ultrastructurales vont être mises en œuvre non seulement pour l’étude de l’hypophyse en culture organotypique (Tixier-Vidal & Picart, 1967) mais également pour celle d’un modèle homogène de lignée clonale, les cellules GH3 de Gordon Sato qui sécrètent la prolactine (Gourdji et al., 1972). Dans ces deux modèles en culture, Mme Tixier avec ses collaborateurs, chercheurs et techniciens mais aussi chercheurs étrangers invités, montrent que la prolactine se localise exclusivement sur les structures membranaires (Tougard et al., 1982) (Figure 7). De plus, avec son équipe, elle observe que les cellules GH3 sont stimulées par la première hormone hypophysiotrope identifiée par Guillemin et Schally au terme de la course au Nobel, la thyrolibérine ou TRH, que l’on aurait pu croire confinée à l’axe thyréotrope (Gourdji et al., 1972). L’analyse des effets stimulateurs de ce tripeptide sur la sécrétion de prolactine va faire basculer l’équipe Tixier vers la biologie cellulaire du processus sécrétoire. Elle étudie sur cellules intactes la liaison de la TRH tritiée et démontre ainsi que la neurohormone est internalisée dans les cellules cibles sans être métabolisée, puisqu’elle se lie au noyau (Gourdji et al., 1973). De fait, la TRH stimule tout d’abord la libération de prolactine préformée puis elle recharge le réticulum endoplasmique en hormone par stimulation de sa néosynthèse hypophysaire. Grâce aux approches de biologie moléculaire, et en collaboration avec le laboratoire liégeois de Martial, Mme Tixier-Vidal et son groupe montrent que la TRH augmente cette néosynthèse de prolactine par un double mécanisme : stimulation transitoire de la transcription (via le Ca++) et stabilisation des ARNm (Laverrière et al., 1983). C’est même dans le compartiment post-golgien que l’équipe a pu localiser le site d’action précoce de la TRH sur la sécrétion de l’hormone. Grâce à des sondes immunologiques appropriées, elle a pu décrire la compartimentation immunochimique du réticulum endoplasmique (Tougard et al., 1983) et montrer comment la TRH stimule à la fois la formation des vésicules golgiennes et leur transport vers la membrane plasmique (Tougard et al., 1982 ; Morin et al., 1984), ce dernier empruntant un circuit original, distinct de celui de la laminine (Vila-Porcile et al., 1988).
Comme anecdote personnelle mais significative du caractère de Mme Tixier, je mentionnerais que j’avais également utilisé la même TRH tritiée de Morgat et Pradelles à Saclay chez le canard in vivo, marquant par radio-autographie certaines cellules hypophysaires. Quand j’ai présenté ces résultats lors d’une réunion de la Société de Neuroendocrinologie à Lyon, Mme Tixier était, comme souvent, au premier rang, guettant ce que j’allais montrer. Je savais que je n’avais pas le droit de dire que mes marquages étaient dus à la TRH elle-même, n’ayant pas fait tous les contrôles biochimiques auxquels s’était astreinte Danielle Gourdji. Malheureusement, fasciné par l’attitude de Mme Tixier comme le taureau par la muleta, je le dis, et j’aggravai mon cas en ajoutant : « comme l’a montré Mme Tixier-Vidal ». Elle sursauta sur sa chaise et, levant lors des questions un doigt vengeur, m’apostropha : « Vous n’avez pas le droit, vous m’entendez, vous n’avez pas le droit ». J’avais fait des contrôles mais ce n’étaient pas les bons…
Dès 1972, Andrée Tixier-Vidal décide de lancer son équipe dans une aventure risquée en étendant l’étude du processus sécrétoire aux neurones hypothalamiques. Il fallait en effet partir de cellules de l’hypothalamus fœtal et obtenir des lignées continues ou des cultures primaires de neurones fonctionnels. Le premier objectif fut atteint avec l’obtention de lignées continues de cellules hypothalamiques transformées par le virus SV40. Ces neurones synthétisaient de la vasopressine mais ne la libéraient pas et ne constituaient pas de synapses (de Vitry et al., 1974). Andrée Tixier-Vidal et ses collaborateurs se sont alors attachés à obtenir des neurones différenciés en cultures primaires, et cela dans un milieu synthétique sans sérum, qu’ils réussirent à mettre au point (Faivre-Bauman et al., 1980). Grâce à ce modèle très original, Mme Tixier a ensuite pu parachever son travail de biologiste cellulaire en montrant le rôle de différents facteurs et de la T3 sur la différenciation des neurones dopaminergiques de l’hypothalamus, puis sur celle des neurones à TRH. Poursuivant l’étude de ces neurones, son équipe est parvenue à décrire les distributions cellulaires respectives de la TRH et de son précurseur, in vivo et in vitro, et à démontrer que le tripeptide n’y est libéré qu’au moment de la formation des synapses (Grouselle et al., 1990).
Enfin, en détectant la synaptophysine comme marqueur des vésicules synaptiques et la secrétogranine comme celui des vésicules à cœur dense, le laboratoire Tixier a montré leur expression et leur ségrégation très précoces dans le trans-Golgi (Tixier-Vidal et al., 1988, 1992). On sait aujourd’hui que le trafic de la synaptophysine en direction de la synapse nécessite par ailleurs l’intégrité des microtubules avec un rôle probable de Rab6p.
Si on considère la cascade neuroendocrine classique que l’École Benoît a tant contribué à établir, on voit que Mme Tixier-Vidal l’a « remontée », passant de la thyroïde à l’hypophyse et de celle-ci à l’hypothalamus, avec comme fil conducteur la dissection moléculaire du processus sécrétoire, endocrine et neuronal, le décodage du signal et pour finir la différenciation neuronale. Elle a fait œuvre de pionnière puisque le mécanisme d’action décrit pour la TRH (avec l’appui de coopérations judicieuses, nationales avec notamment D. Louvard, et internationales avec J. Martial à Liège et B. Wiedenmann à Berlin) a été retrouvé depuis pour d’autres neuropeptides. Quel chemin parcouru depuis la thyroïde du canard et les colorants de l’hypophyse !
Forte, depuis 1952, de 300 publications dont 245 dans des revues internationales, 40 rapports sur invitation dans des congrès internationaux, 12 chapitres invités, trois ouvrages dont un livre sur la biologie cellulaire de la sécrétion des protéines qui a fait longtemps autorité et bien sûr la direction de nombreuses thèses, l’œuvre scientifique de Mme Tixier-Vidal est aussi dense qu’originale. Elle a fait faire à la biologie cellulaire de la sécrétion des percées décisives grâce notamment à la mise en œuvre de modèles in vitro de cultures cellulaires qu’elle a diffusés autour d’elle et dont elle était devenue une référence internationale. La reconnaissance de ses nombreuses contributions majeures lui est aussi venue de ses pairs avec l’attribution de plusieurs prix prestigieux notamment le Grand Prix scientifique de la Ville de Paris, son élection comme correspondant étranger de l’Académie Royale de Médecine de Belgique, la présidence de nombreuses sociétés savantes : la Société d’Endocrinologie, la Société de Biologie Cellulaire et bien sûr la Société de Neuroendocrinologie (dont elle a été la première présidente). De fait elle figure ici (Figure 8) avec une « brochette » de présidents de la Société.
Mais Mme Tixier-Vidal ne demeurait pas dans la tour d’ivoire de son laboratoire, si bien tenu soit-il, avec une « patronne » à l’autorité ferme et indiscutée. J’ai eu le privilège d’assister à une des réunions du lundi matin où elle disséquait « jusqu’à l’os » un article repéré pendant le week-end dans les Current Contents. Bourreau de travail, dotée d’une volonté de fer, Mme Tixier-Vidal a aussi affronté le monde des commissions scientifiques jusqu’à leur présidence où sa compétence, sa rigueur et l’indépendance de son jugement étaient unanimement appréciées, tout comme ses questions dans les congrès, si redoutées comme je l’ai illustré plus haut. Encore très récemment, toujours pertinente et pugnace, elle participait au Conseil et aux séances de la Société de Biologie avec, dans ses interventions, l’intérêt passionné et l’enthousiasme d’une jeune chercheuse.
Rentrée à la maison dans son cher appartement du quai Henri IV, elle y retrouvait un mari à la personnalité forte et exigeante avec lequel elle a partagé 65 ans de vie commune et une fille brillante qui lui a fait découvrir à partir des années 1990 l’art d’être grand-mère, avant d’avoir la joie du succès à l’agrégation de son petit-fils et de connaître son arrière-petite-fille. Mme Tixier-Vidal, si respectée, voire redoutée dans son environnement professionnel, redevenait « femme au foyer » et cordon bleu justement réputé. Sa longue vie (elle serait entrée le 10 avril dernier dans sa centième année), si parfaitement accomplie jusqu’au bout, demeure exemplaire : ce pur produit de la « méritocratie » républicaine honore les organismes qui l’ont accueillie : CNRS et Collège de France. Pour souligner une fois encore la beauté d’un métier qu’elle a aimé plus que tout, c’est elle-même que je citerai. Elle s’exprimait ainsi aux obsèques de Claude Kordon :
« Nous savons tous, et les biologistes l’acceptent, je crois plus que d’autres, que notre destinée s’achève dans la poussière. Que reste-t-il après nous ? Nos travaux, ce qui est un privilège que nous partageons avec les artistes. Mais surtout la trace que nous laissons dans la mémoire de nos proches, notre famille, nos amis. Là est la survie à laquelle nous aspirons tous ».
Avec les proches, la famille et les amis de Madame Tixier-Vidal, réunis pour célébrer sa mémoire et représentés dans ce volume, nous voudrions témoigner des liens que sa personnalité et son caractère ont su tisser avec elle et souvent aussi entre nous, des liens toujours solides après 30 années et qui ne s’effaceront pas.
Références
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Citation de l’article : Calas, A. (2022). De la neuroendocrinologie à la biologie cellulaire : Andrée Tixier-Vidal (1923–2021). Biologie Aujourd’hui, 216, 75-81
Liste des figures
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Figure 1 Mme Tixier-Vidal peu après son jubilé. |
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Figure 2 Réunion d’Obernai, 1996 : Mme Tixier-Vidal et Ivan Assenmacher (au second plan, W. Rostène et J.Y. Daniel). |
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Figure 3 Coupe sagittale de la région hypothalamo-hypophysaire de canard après section des veines-portes dont la régénération a été bloquée par une lame de collagène (C). AH : antéhypophyse ; EM : éminence médiane ; LN : lobe nerveux. |
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Figure 4 Coupe d’antéhypophyse de canard colorée par le tétrachrome de Herlant (cliché A. Tixier-Vidal). |
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Figure 5 Coupes d’antéhypophyse de caille colorées pour la mise en évidence des glycoprotéines. A : au repos sexuel ; B : en activité sexuelle. |
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Figure 6 Coupe ultrafine d’antéhypophyse de canard en activité sexuelle, observée en microscopie électronique. FSH : cellule à folliculo-stimuline ; LTH : cellule à prolactine. |
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Figure 7 Coupes fines d’une cellule en culture d’hypophyse de rat (A) et d’une cellule tumorale GH3B6 (B) après marquage de la prolactine par immunoperoxydase (cliché C. Tougard). |
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Figure 8 Anciens présidents de la Société de neuroendocrinologie (de gauche à droite) : W. Rostène, C. Kordon, J.-D. Vincent, A. Tixier-Vidal, A. Calas et leur hôte à Lille, J. Barry. |
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