Numéro |
Biologie Aujourd'hui
Volume 206, Numéro 4, 2012
Journée Claude Bernard 2011
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Page(s) | 301 - 312 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/jbio/2012029 | |
Publié en ligne | 19 février 2013 |
Mécanisme moléculaire d’action de l’acide abscissique en réponse à la sécheresse chez les végétaux
The ABC of abscisic acid action in plant drought stress responses
1
Institut des Sciences du Végétal, Centre National de la Recherche
Scientifique, Unité Propre de Recherche 2355, 1 Avenue de la Terrasse Bât. 23, 91198
Gif-sur-Yvette Cedex,
France
2
Laboratoire de Biochime et Physiologie Moléculaire des Plantes UMR
CNRS (5004)/INRA (388)/SupAgro/UM2. Campus INRA/Montpellier SupAgro 2,
Place Viala
34060
Montpellier Cedex 2,
France
Auteur correspondant : Jeffrey Leung,
Leung@isv.cnrs-gif.fr
Reçu :
30
Avril
2012
La consommation d’eau douce dans les pays les plus développés est aux alentours de 200 à 700 litres par habitant et par jour, dont environ 70 % seraient destinés aux besoins agricoles. Contrairement à d’autres ressources naturelles (comme les différentes formes d’énergie), l’eau n’a pas de produit de substitution. Au cours des dernières années, un énorme chemin a été parcouru concernant notre compréhension de la perception de l’acide abscissique (ABA), une phytohormone qui régule la majorité des réponses adaptatives au déficit hydrique. Face à des conditions environnementales toujours plus contraignantes, notre état de connaissance actuel sur la signalisation de l’ABA est-il suffisant pour assurer le maintien de la productivité des plantes de grande culture tout en consommant moins d’eau ? Cette question suscite des réflexions autant scientifiques que politiques. Bien que l’ABA soit historiquement considéré comme une phytohormone depuis 1960, elle a été redécouverte dans les années 1980 chez de nombreux organismes (éponges de mer, certains parasites, hydres, etc.), dont l’Homme. De manière étonnante, l’ABA présente des propriétés anti-inflammatoires et antivirales. De plus, les gènes homologues codant les récepteurs et les principaux intermédiaires de la signalisation sont conservés, ce qui suggère que les connaissances issues des études utilisant la plante comme modèle seraient applicables à d’autres organismes. La teneur en ABA pourrait atteindre un niveau 10 à 30 fois supérieur à la normale chez des plantes soumises à un stress hydrique; l’ABA agit alors comme un déclencheur de diverses voies d’adaptation permettant à la plante de mieux résister au stress hydrique. Un modèle expérimental qui se prête particulièrement bien à l’étude de la complexité de l’action de l’ABA est la fermeture des stomates, une réponse physiologique mise en place par les végétaux supérieurs pour limiter la perte d’eau par transpiration. Les stomates sont de petits pores à la surface des feuilles. Chaque pore est entouré par une paire de cellules oblongues et légèrement courbées (en forme de rein), appelées cellules de garde, dont les mouvements contrôlent son degré d’ouverture. L’essor de la recherche sur les rôles physiologiques joués par l’ABA au cours du développement de la plante (notamment sur l’abscission des fruits et la dormance des bourgeons) a débuté dans les années 1960, et a abouti en 2009 à l’identification d’une famille de récepteurs cytosoliques de l’hormone. Cette découverte a été suivie très rapidement par la reconstitution de plusieurs cascades de transduction signalétiques ABA-dépendantes in vitro. De nombreuses études ont été réalisées sur les structures cristallines des protéines appartenant au complexe cœur de la signalisation par l’ABA (un récepteur, une phosphatase et une kinase), prises individuellement ou en combinaison, en complexe ou non avec l’ABA. Ces études laissent entrevoir la possibilité de concevoir des agonistes et antagonistes de l’hormone afin de permettre aux végétaux de mieux s’adapter au stress hydrique. Cette revue retracera le progrès extraordinaire qui a permis d’éclairer la façon dont l’ABA agit sur les transports à travers la membrane plasmique, aboutissant à la fermeture des stomates pour limiter la transpiration.
Abstract
The combined daily consumption of fresh water ranges from 200 to 700 liters per capita per day in most developed countries, with about 70% being used for agricultural needs. Unlike other resources such as the different forms of energy, water has no other alternatives. With the looming prospect of global water crisis, the recent laudable success in deciphering the early steps in the signal transduction of the “stress hormone” abscisic acid (ABA) has ignited hopes that crops can be engineered with the capacity to maintain productivity while requiring less water input. Although ABA was first discovered in plants, it has resurfaced in the human brain (and many other non-plant organisms : sea sponge, some parasites, hydra to name a few), suggesting that its existence may be widespread. In humans, more amazingly, ABA has shown anti-inflammatory and antiviral properties. Even its receptors and key signaling intermediates have homologs in the human genome suggesting that evolution has re-fashioned these same proteins into new functional contexts. Thus, learning about the molecular mechanisms of ABA in action using the more flexible plant model will be likely beneficial to other organisms, and especially in human diseases, which is topical in the medical circle. ABA can accumulate up to 10 to 30-fold in plants under drought stress relative to unstressed conditions. The built up of the hormone then triggers diverse adaptive pathways permitting plants to withstand temporary bouts of water shortage. One favorite experimental model to unravel ABA signaling mechanisms in all of its intimate detail is based on the hormone’s ability to elicit stomatal closure – a rapid cellular response of land plants to limit water loss through transpiration. Each microscopic stoma, or pore, is contoured by two specialized kidney-shaped cells called the guard cells. Because land plants are protected by a waxy cuticle impermeable to gas exchange, the stomatal pores are thus the primary portals for photosynthetic CO2 uptake. Drought, by biasing pathways that lead to rapid closure of these pores, has therefore a negative impact on photosynthesis, and consequently, biomass as well. The stomatal aperture widens and narrows by expansion and contraction, respectively, of these flanking guard cells caused by changes in the intracellular concentrations of ion fluxes. These transport mechanisms most likely share fundamental principles with any excitable cell. These events require coordination of channels, vacuolar and membrane transporters that generate a specific pattern of electrical signals that relay the ABA stimulus. Research on ABA begun in the 1960′s has now been crowned by the achievement of having identified the soluble ABA receptor that turns on and off the activities of a kinase/phosphatase pair, as the heart of the signaling complex. Results distilled from the latest structural studies on these ABA receptors, characterized by the so-called START domain, are beginning to tender the most exciting promise for rational design of agonists and antagonists towards modulating stress adaptive ability in plants. This review will chart the recent extraordinary progress that has enlightened us on how ABA controls membrane transport mechanisms that evoke the fast stomatal closing pathway.
Mots clés : Acide abscissique / réponse à la sécheresse / cellules de garde / fermeture stomatique
Key words: Abscisic acid / guard cells / drought response / stomatal closure
© Société de Biologie, 2013
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