Numéro |
J. Soc. Biol.
Volume 195, Numéro 1, 2001
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Page(s) | 39 - 46 | |
Section | Thérapie cellulaire | |
DOI | https://doi.org/10.1051/jbio/2001195010039 | |
Publié en ligne | 4 avril 2017 |
Transgressions de lignages par des cellules pluripotentes issues de l’adulte
Lineage transgressions by pluripotent stem cells from the adult organism
Institut d’Embryologie cellulaire et moléculaire du CNRS et du Collège de France, 49 bis, avenue de la Belle Gabrielle, 94736 Nogent-sur-Marne cedex Tel. : 01 45 14 15 15. Fax : 01 48 73 43 77. E-mail: dieterle@infobiogen.fr
De nombreuses publications depuis trois ans rapportent la possibilité de détourner les cellules souches de différents tissus adultes de la spécification qui leur avait été imposée au cours du développement (Tableau I). Cette donnée révolutionnaire ouvre d’importantes perspectives pour la thérapie cellulaire.
L’aspect le plus étonnant de ces nouveaux résultats réside dans le fait que la plasticité des cellules souches nouvellement découvertes ne respecte pas les barrières entre feuillets germinatifs primordiaux.
La présente revue souligne que la théorie des feuillets germinatifs primordiaux, émise par von Baer en 1848, rend toujours compte du développement embryonnaire, en ce sens que, sans gastrulation et sans feuillets germinatifs, il n’y a pas d’embryogenèse normale.
Les cellules souches (CS) ont d’abord été définies dans le système hématopoïétique, puis dans d’autres tissus sujets à un renouvellement important, tels que l’épithélium intestinal ou l’épiderme. Aujourd’hui il est bien établi que des tissus présumés non renouvelables comme le tissu nerveux ne sont pas aussi immuables qu’on les considérait : ainsi il est relativement aisé d’isoler des cellules souches nerveuses et de les cloner. Un progrès important dans l’identification des CS est constitué par la découverte d’une stratégie qui permet de les identifier et de les isoler à partir, semble-t-il, d’un tissu quelconque (Goodell et al., 1996). Cette stratégie, fondée sur la propriété qu’ont les cellules d’éliminer certaines drogues toxiques, fait appel au tri cytofluorimétrique des cellules colorées par le colorant Hoechst 33342 examinées sous deux longueurs d’onde distinctes. La « side population » (population marginale, SP) comprend des cellules qui relarguent le colorant, par la voie d’un canal d’extrusion des toxines codé par le gène « mdr » (multidrug resistance) ; ces cellules sont donc beaucoup moins colorées que le reste de la population.
Les différents cas où des cellules souches ont pu être détournées de leur vocation originale sont ensuite répertoriés (Tableau I) et commentés.
Finalement est analysé un article qui décrit le rôle de Pax7 comme gène de spécification musculaire (Seale et al., 2000). Il existe une population SP chez les souris Pax7- alors que les cellules satellites, responsables chez la souris normale de la croissance postnatale et de la régénération du muscle, sont absentes. Cette population SP Pax7-/-, ensemencée in vitro dans des conditions qui permettent à la fois la différenciation musculaire et la différenciation hématopoïétique, ne donne pas de colonies myocytaires mais donne 10 fois plus de colonies hématopoïétiques que la population SP Pax7+/+. L’expression de Pax7 paraît donc caractériser une étape de restriction de la détermination des cellules souches.
Cette revue conclut à la nécessité de comprendre en profondeur les éléments qui réussissent à détourner certaines cellules souches de la voie où elles étaient déjà spécifiées. Ces éléments (facteurs de croissance, interactions cellulaires), probablement complexes, sont en général réunis lorsque l’hôte subit des agressions drastiques : souvent affecté d’une déficience génétique, celui-ci est de plus irradié. Le microenvironnement embryonnaire, non modifié, semble cependant capable à lui seul d’imposer des transgressions de lignages à des cellules greffées. Toute application thérapeutique passera par une élucidation de ces processus et surtout devra établir comment contenir une prolifération éventuelle des cellules souches greffées.
Abstract
When proceeding normally, embryonic morphogenesis begins with germ layer formation through the process of gastrulation. Each primordial germ layer gives rise to a particular set of lineages. Until recently, it was considered that fate switches between germ layers were impossible. In the last two or three years however, a fair number of such switches have been described (Table I), the most spectacular of which entails the differentiation of neural stem cells into various derivatives. This unexpected plasticity opens important prospects for cell therapy.
Stem cells, which are the cells that display this plasticity, are dehned by the two properties of self renewal and pluripotency. They are set apart during ontogeny and are responsible for maintaining the homeostasis of a tissue. This notion, first established in the case of hematopoietic stem cells was later extended to other fast renewing cells, such as those in the intestinal epithelium or epidermis, and more recently to cells reputedly non-renewable, i.e. neurons. A new strategy has been described, which has the interesting feature that it can be applied to the isolation of stem cells from various lineages. It consists in sorting out cells on the basis of the efflux of Hoechst 33342 dye (Goodell et al., 1996). When a cell suspension stained with this dye is examined under two distinct wave lengths, a “side population” (SP), characterized by weak fluorescence, can be identified and sorted out. The dye efflux property of these cells is due to the activity of the mdr (multidrug resistance) gene, which encodes a protein responsible for the building of a canal which serves to extrude toxins from the cells.
A means of distinguishing a truly multipotent stem cell from a progenitor committed to a specific lineage has been reported. This consists in the expression of the Pax7 gene. Pax7-/- mouse muscles have no satellite cells, i.e. they miss the cells normally responsible for the regeneration of muscle. In contrast they do have an SP population. These SP cells are incapable of differentiating into muscle, but give rise to 10 times more hematopoietic colonies, when cloned in vitro, than SP cells from wild type muscle do. Thus Pax7 appears to be a commitment gene, in the absence of which stem cells cannot become specified to the muscle lineage.
As a conclusion, this review emphasizes various features of the recent findings: 1) the unexpected plasticity uncovered in recent years is restricted to the stem cells of each tissue; 2) the switch in phenotype has to be “forced” on these stem cells by drastic experimental conditions enforced in the host: often sublethal irradiation is superimposed on a genetic deficiency.
Progress in this field, concerning both conceptual and applied aspects, will require the identification of the factors characterizing the niches which promote integration and fate switches of stem cells, probably a combination of growth factors and intercellular interactions.
Finally a key issue, before any therapeutical applications can be considered, is how to control the proliferation of transplanted stem cells in their new environment.
© Société de Biologie, Paris, 2001
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